Responsable du Programme bonne
gouvernance économique et politique de Oxfam Intermon en
Mauritanie, Monsieur
Djjigo particite au Forum social africain Dakar 2014. Dans cet entretien sur
l’accaparement de terres, il invité les autorités à la conciliation entre les
impératifs du développement et les droits inaliénables des populations.
Quelle est aujourd’hui
l’ampleur de l’accaparement des terres en Mauritanie ?
La
question de l’accaparement des terres commence à être une problématique
globale. Ce phénomène s’est installé au niveau de beaucoup de pays africains, notamment
la Mauritanie. Des investisseurs étrangers arrivent de plus en plus dans le
pays. Ils achètent ou louent des terres. Ils produisent en Mauritanie pour nourrir
leurs populations.
Comment peut-on concrètement mesurer
cette expropriation foncière ?
Au
niveau de la partie Sud du pays, une société saoudienne (RHJ) est en train de
négocier avec le gouvernement pour avoir 31 000 hectares de terres. Le
projet n’a pas encore commencé, certes. Mais les populations concernées par
cette zone à attribuer ou qui l’a été déjà, se mobilisent pour réclamer leur
droit à la sécurité foncière.
Mais selon vous, qu’est-ce qui être
à l’origine de la ruée sur les terres africaines en général, Mauritaniennes en
particulier ?
Cela
peut s’expliquer par le fait que le monde entier connait aujourd’hui un
problème alimentaire. Cette pénurie de denrée nourricière concerne plusieurs
pays, comme le notre. Les investisseurs (privés et étatiques) étrangers savent
qu’il est facile d’acquérir des terres dans nos pays où la législation foncière
est très faible. Un autre facteur est l’abondance de terres arables et de l’eau.
Il est alors facile d’amortir son investissement. La terre est non seulement
moins chère, mais aussi la fiscalité est presque inexistante. Les opérateurs
préfèrent alors produire là où le coût de la production est très bas, pour
ensuite vendre le produit à un
prix excessivement élevé sur le marché mondial. Donc l’accaparement de terres est
un moyen de fructifier son argent.
Mais
qui sont les auteurs de ce fléau en Mauritanie ?
Les
acteurs sont multiples. Parmi eux, des opérateurs économiques nationaux. Il y a
également des investisseurs étrangers venant des pays arabes, de l’Indes, d’autres
pays africains… A cela s’ajoute des hommes politiques qui acquièrent de la terre
pour développer leur capital.
Quelles peuvent en être les
conséquences sur les exploitations familiales ?
Les
exploitations familiales sont de plus menacées. La plupart de ses exploitants
n’ont pas de titres fonciers. Les agriculteurs familiaux ne peuvent pas faire
appel au témoignage pour prouver que les terres les appartiennent. Car cela
n’est pas pris en compte. La victime, selon les procédures, doit prouver que la
terre son patrimoine. Autrement, elle est du domaine de l’Etat. C’est cela le
paradoxe.
Que faut-il faire pour guérir
de ce mal?
La
solution passe par la réforme de la législation foncière. Ce, pour l’adapter
aux réalités de nos populations. Il faudrait également voir comment concilier
les objectifs du développement avec les droits inaliénables des populations. Il
faut consulter les populations quant aux décisions les concernant. L’Etat doit
également penser à la sécurisation des droits des populations.
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